Article en date du 10 février 2019

Comme nombre de ses prédécesseurs, l’actuel ministre du Logement Julien DENORMANDIE marque de son nom l’univers de l’investissement locatif. Depuis le premier janvier 2019, le régime PINEL est étendu aux immeubles anciens nécessitant des travaux de rénovation et devient le régime DENORMANDIE.

Comme nombreux de ces prédécesseurs Julien DENORMANDIE, ministre de la Ville et du Logement marque de son nom l’univers de l’investissement locatif en élargissant le régime PINEL aux immeubles anciens dégradés des centres – villes de moyenne taille.
Ce nouveau régime s’inscrit dans l’esprit de la loi pour l’Évolution du Logement de l’Urbanisme et du Numérique dite loi ÉLAN dont la revitalisation des centres-villes et la création de logements par la restauration d’immeubles dégradés en sont deux piliers fondateurs.

Au-delà des détails techniques et juridiques sur l’application du dispositif, toute la question est de savoir si l’incitation fiscale peut inverser la désertification des villes de moyenne taille.
Sur le fond rien ne change. Les droits et obligations sont les mêmes:

– Même taux de réduction, 18 % sur 9 ans et 21 % sur 12 ans ;
– Même possibilité de louer à ses ascendants ou descendants ;
– Mêmes périodes d’engagement 6, 9 et 12 ans ;
– Même montant de plafonnement pour le calcul de la réduction, 300 000 €
– Même condition de location (plafonnement des loyers et des ressources des locataires et bail d’habitation pour la résidence principale du locataire)

Il serait donc plus juste de parler d’adaptation du régime PINEL à l’esprit de la loi ELAN du 23 novembre 2018. Avec pour objectif lutter contre les logements dégradés situés dans les centres-villes des communes dont la liste est fixée par décret et qui ont passé une convention d’Opération de Revitalisation de Territoire (ORT) avec l’État.

Quels logements ?

Le régime s’applique aux logements acquis entre le 1e janvier 2019 et le 31 décembre 2021 qui font ou qui ont fait l’objet de travaux de rénovation. Ainsi que les locaux d’activité dont la destination est changée pour de l’habitation sous les conditions de travaux identiques aux logements.

Quels travaux ?

L’article 226 de la Loi de finances pour 2019 stipule qu’il s’agit de travaux affectés au logement. La Loi ne précise rien sur une quote-part de travaux affectés aux parties communes. Un décret doit préciser les travaux à réaliser. Normalement ils devraient être moins contraignants que ceux prévus dans les dispositifs préexistants comme le régime PINEL ANCIEN. La mise à niveau sur les normes de performance énergétique identiques aux logements neufs ne sera pas exigée. Il s’agirait à minima de rendre le logement conforme aux caractéristiques de décences de l’article 6 de la LOI n°2018-1021 du 23 novembre 2018 – art. 142.

Quelles sont les personnes concernées ?

Les personnes physiques ou associées d’une société ne relevant pas de l’impôt sur les sociétés. Précisons que selon l’article de la Loi, investisseur et maître d’ouvrage des travaux sont bien deux personnes distinctes.

Qu’elles sont les villes concernées ?

Pour le moment le dispositif a retenu les 222 villes qui étaient programmées dans le plan « Action Cœur de Ville » mis en place depuis mars 2018.

 

 

Quels résultats attendre du régime DENORMANDIE ?

De nombreuses villes du Plan Action Cœur de Ville sont issues des zones B2 et C du dispositif PINEL. Rappelons que depuis le 1er janvier 2018 ces zones ne sont plus éligibles au dispositif, car ne correspondant pas à des zones de marchés tendus. Dit autrement il n’y a pas de demande locative sur ces zones.
D’où cette question : l’immobilier ancien restauré est-il censé créer la demande ?

Il ne faudrait pas confondre la cause et l’effet.

Les immeubles anciens dégradés ne sont pas la cause de la perte du dynamisme des villes moyennes, mais l’effet d’une demande locative trop faible voire inexistante.
Un propriétaire bailleur ne s’engagera pas dans les travaux de rénovation sans être certain d’avoir des locataires. Le 14 décembre 2017, le Premier ministre Édouard PHILIPPE concluait la Conférence nationale des territoires (CNT) « Notre pays est confronté depuis des années à des vitrines fermées, des immeubles dégradés, des rues délaissées qui nourrissent un sentiment d’abandon aux lourdes conséquences » Monsieur Édouard PHILIPPE avait-il déjà un gilet jaune dans sa poche en faisant ce constat. Cette question n’est – elle pas une des causes – voire LA cause fondamentale – des revendications du mouvements des Gilets Jaunes. Dissocier la politique du logement de l’ensemble du cycle économique serait contreproductif. Dans cet esprit l’incitation fiscale par le régime DENORMANDIE serait un élément du volet fiscal de la politique économique et sociétale des régions. Pris distinctement d’un plan de politique générale, le dispositif risque d’être jugé par certains comme une nouvelle niche fiscale accordée à certains

Ce que nous pouvons regretter :

  1. Que le dispositif ne concerne pas les villes de marché locatif tendu (A, ABIS et B1). Nous perdons là une bonne occasion de lutter contre les copropriétés dégradées pour lesquelles les propriétaires bailleurs ne rénovent pas leurs appartements étant certains de trouver des locataires.
    2. Qu’une partie des travaux ne concerne pas les parties communes de l’immeuble. Que vaudrait un immeuble dont les parties privatives seraient rénovées et les parties communes dégradées dont notamment le ravalement.

En conclusion :

Plus simple que le dispositif « PINEL ancien » dont les conditions de travaux ne permettaient pas aux investisseurs une sécurité juridique et fiscale, le dispositif DENORMANDIE intéressera certainement de nombreux investisseurs.
Mais attention, la simplicité apparente ne doit pas faire oublier les risques locatifs. Rappelons ici qu’un manque prolongé de locataire peut entraîner la reprise par l’Administration fiscale des avantages fiscaux perçus.
En conséquence, une étude du marché locatif, une expertise technique et financière de l’immeuble garantira à l’investisseur la réussite de son projet.